Lionel Desmeules, orgue
Depuis que Saint-Pierre y subit le martyre, Rome était devenue le phare de l’occident chrétien. La ville aux sept collines, demeure des successeurs du premier pontife, était le lieu unique de convergence de toute la chrétienté, comme une source d’eau vive. Le grand Charlemagnes lui-même, nouvel empereur d’occident, y reçu l’onction du Pape Léon III. Le schisme de 1054 puis, de manière plus grave encore, la réforme de 1517 vinrent assombrir cette lumière. Rome n’en est pas moins restée, malgré les aléas du XIVème siècle, le siège de la Sainte-Église.
Pour un ancien – l’ancien étant le contraire du moderne – l’attachement à une tradition vénérable est une nécessité. Ainsi, dans le domaine de la musique sacrée, le voyage de Rome, pour tout maître de chapelle ou organiste, est quasi un incontournable. C’est sous les voûtes de la Basilia di San Pietro et de la Basilica di San Giovanni in Laterano que l’art de la musique liturgique est porté à son plus haut degré de perfection.
Le grand Girolamo Frescobaldi, formé auprès de Luzzasco Luzzaschi, fut une lumière dans le phare. Nommé organiste de la Basilique vaticane en 1608, il ne cesse de réjouir les oreilles de qui l’entend. On disait de lui qu’il jouait mieux à l’envers que tous ses collègues à l’endroit. Sa musique n’est qu’un reflet de l’art de cet immense musicien. Ils furent nombreux les organistes catholiques à venir étudier auprès de lui.
Pour les tenants de la réforme, en revanche, aucun pôle, aucune capitale, aucun « temple-père ». Schütz dut se rendre à Venise, sous les ors de la Basilica di San Marco pour y apprendre son métier. Il fallut attendre 1564 et la nomination du grand Jan Pieterszoon Sweelinck à l’orgue de la Oude Kerk d’Amsterdam pour que les organistes protestants trouvent eux aussi leur vénérable tradition. Ainsi, les temples des villes de la hanse germanique résonnèrent tous des élèves du maître hollandais et ce jusqu’à la fin du XVIIème siècle.
Notre programme met en présence ces deux figures de proue de l’orgue qui se rencontrèrent sans doute lors du voyage de Frescobaldi dans les Flandres en 1607. La disposition d’un orgue de type italien et d’un orgue de type espagnol – rappelons que les Flandres furent longuement occupées par l’Espagne – dans le temple Saint-François nous permet de faire se rencontrer ces deux mondes et de les faire dialoguer.
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